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Les Fleurs du mal - Charles Baudelaire

Poème n° 5 : Le Serpent qui danse

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    Que j'aime voir, chère indolente,
        De ton corps si beau,
    Comme une étoffe vacillante,
        Miroiter la peau !

    Sur ta chevelure profonde
        Aux âcres parfums,
    Mer odorante et vagabonde
        Aux flots bleus et bruns,

    Comme un navire qui s'éveille
        Au vent du matin,
    Mon âme rêveuse appareille
        Pour un ciel lointain.

    Tes yeux où rien ne se révèle
        De doux ni d'amer,
    Sont deux bijoux froids où se mêlent
        L’or avec le fer.

    A te voir marcher en cadence,
        Belle d'abandon,
    On dirait un serpent qui danse
        Au bout d'un bâton.

    Sous le fardeau de ta paresse
        Ta tête d'enfant
    Se balance avec la mollesse
        D’un jeune éléphant,

    Et ton corps se penche et s'allonge
        Comme un fin vaisseau
    Qui roule bord sur bord et plonge
        Ses vergues dans l'eau.

    Comme un flot grossi par la fonte
        Des glaciers grondants,
    Quand l'eau de ta bouche remonte
        Au bord de tes dents,

    Je crois boire un vin de bohême,
        Amer et vainqueur,
    Un ciel liquide qui parsème
        D’étoiles mon cœur !

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©Jean-Marie PETIT - HomeSweetHome - 03/2022